jeudi 4 juin 2015

Etienne Cabet, théoricien politique : "Voyage en Icarie" (1848). Cinquième édition de cette utopie sociale et politique basée sur le communisme.




Étienne CABET

VOYAGE EN ICARIE PAR M. CABET.

Paris, Au Bureau du Populaire, 1848. Typographie Félix Malteste et Cie.

1 volume in-12 (18 x 12 cm) de (4)-VIII-600 pages.

Reliure demi-chagrin marron, dos à nerfs, fleurons dorés, plats de papier décoré, doublures et gardes de papier marbré (reliure de l'époque). Reliure légèrement frottée, intérieur frais sans rousseurs.

Provenance : Ex-libris Charles Marolle. Exemplaire vendu (sorti du catalogue) par la Keele University (UK), nous fournissons avec l'exemplaire le courrier qui certifie que cet exemplaire est sorti légalement des fonds de cette bibliothèque universitaire anglaise. (cachet sur les tranches et timbre sec sur la page de titre).

CINQUIÈME ÉDITION.

L'aventure de l'ouvrage fondamental d'Étienne Cabet est une des plus intéressantes du XIXe siècle. Ce dijonnais, fils d'un maître-tonnelier, né en 1788 et mort à Saint-Louis (Missouri, USA) en 1856, était un théoricien politique français, classé parmi les socialistes utopiques par Karl Marx et Friedrich Engels, qui lui opposent un socialisme scientifique. C'est en 1840, à Londres, qu'il écrivit ce Voyage en Icarie (publié pour la première fois sous ce titre en 1842 et sous son véritable nom), description d'une cité idéale ; et fonda en 1848 une communauté utopique du même nom, Icarie, sur les bords de la rivière Rouge, au Texas.

Son Voyage en Icarie est le plan détaillé d'une utopie communiste. Dans sa préface, Cabet le présente comme « un véritable traité de morale, de philosophie, d'économie sociale et politique », qu'il invite ses lecteurs à « relire souvent et étudier ». Les malheurs de l'humanité sont selon Cabet dus à la « mauvaise organisation de la Société », résultant dans son « vice principal », l'« Inégalité ». La première partie de Voyage en Icarie décrit un jeune aristocrate anglais découvrant sur l'île Icaria une « grande Nation organisée en Communauté », une république — mais Cabet précise dans sa préface qu'il s'agit là d'une res publica au sens large : « Une Monarchie réellement représentative, démocratique, populaire, peut être mille fois préférable à une République artistocratique », explique-t-il. La deuxième partie de l'ouvrage, plus didactique, explique comment la transition s'est effectuée, d'une « grande et vieille Nation » en une « Communauté », grâce à un « Régime transitoire » démocratique. Cabet expose les théories et les doctrines du régime communautaire. Selon Cabet, les communistes sont les disciples, les imitateurs et les continuateurs de Jésus-Christ et des premiers Chrétiens, qui avaient eux-mêmes renoncé à la propriété individuelle. Cabet propose de revenir à ce communisme primitif en éliminant d’abord ce qu'il voit comme la principale cause de la décadence actuelle, l'« Inégalité ».

"(…) L'inégalité de fortune, la propriété et la monnaie, enfantent les privilèges et l'aristocratie, puis l'opulence et la misère, puis la mauvaise éducation, puis la cupidité et l'ambition, puis tous les vices et tous les crimes, puis tous les désordres et le chaos, puis toutes les calamités et toutes les catastrophes. Oui, examinez, réfléchissez, remontez, dans toutes les sociétés, à l'établissement de la propriété et de la monnaie, et surtout de l'illégalité illimitée de fortune, remontez de faits en faits, d'événements en événements, d'institutions en institutions, de législateurs en législateurs, de causes secondes en causes premières, de conséquences en principes, de nécessités en nécessités, de jour en jour et de siècle en siècle : vous trouverez toujours et partout, pour cause unique du mal, opulence et misère !" (Extrait)

"Et par conséquent le remède, l'unique remède du mal, c'est la suppression de l'opulence et de la misère, c'est-à-dire l'établissement de l'égalité, de la communauté de biens et d'une bonne éducation. (…)" (Extrait)

"Avec la communauté, plus de pauvres ni d'oisifs ; plus de crimes ni de supplices, plus d'impôts ni de police, plus de contestations ni de procès, plus d'inquiétudes ni de soucis ; tous les citoyens amis et frères ; tous non seulement heureux, mais également heureux !" (Extrait)

L'histoire de la colonie d'Icarie aux États-Unis d'Amérique : Le 10 octobre 1847, environ 150 personnes réunies dans les locaux du journal “ Le Populaire ” votent l’“ Acte de Constitution d’Icarie ”, élisent comme président Étienne Cabet et établissent le “ bureau de l’immigration Icarienne ” dans ces locaux. En décembre, Charles Sully est envoyé comme éclaireur pour préparer le terrain situé sur les rives de la Red River vers la ville de Cross Timber au Texas. Le 3 février 1848, 69 colons dirigés par Gouhenart, un peintre et marchand de tableaux, en l’absence de Cabet qui purge une peine de prison embarquent au port du Havre. Ils n’arrivent sur leur terrain qu’en juin 1848 après une longue et pénible marche parce que la Red River n’est pas praticable jusqu’à Cross Timber. Là, ils tentent d’organiser leur communauté mais sont vite découragés par le climat malsain : plusieurs colons y meurent à cause de la fièvre paludique. Ils décident donc de se rendre en Nouvelle Orléans où, après avoir rencontré d’autres colons Icariens embarqués le 15 octobre, le 2 et le 12 novembre à Bordeaux qui sont dans une situation identique à la leur, ils votent la dissolution de la communauté Icarienne. Cabet, dès son arrivée en Nouvelle Orléans le 19 janvier 1849, tente de reprendre les choses en main ; il convoque une assemblée générale grâce à laquelle il arrive à convaincre 280 hommes, 74 femmes et 64 enfants sur un total de 485 colons à poursuivre l’aventure Icarienne. C’est ainsi que le premier mai 1849 les colons arrivent dans l’Illinois à la ville de Nauvoo fondée en 1840 par les Mormons qu’ils abandonnèrent par la suite. Le climat est sain et les terres son fertiles. Pendant l’assemblée générale du 21 février 1850, les colons votent la constitution définitive de la communauté Icarienne. La communauté prospère et les colons, français comme américains affluent jusqu’en décembre 1855. En effet, une crise interne due à l’insurrection de plusieurs colons qui jugent Cabet trop autoritaire et le système qu’il a mis en place trop liberticide, se résout par son départ, en octobre 1856, accompagné de 75 hommes, 47 femmes et 50 enfants, pour Saint Louis dans le New Bremen. C’est là, peu après leur installation, que Cabet meurt d’une attaque cérébrale. Mercadier qui est élu président afin de lui succéder décide de quitter Saint Louis en mai 1858 pour installer la communauté à Cheltenham. La communauté prospère jusqu’en 1863 quand les colons doivent prononcer sa dissolution, ruinés par la Guerre de Sécession. J.-B. Gérard, qui avait succédé à Cabet dans la ville de Nauvoo décide en 1857, alors à la tête de 240 colons, d’installer la communauté à Corning dans l’Iowa sur les rives de la Nodaway. Certains décident alors de retourner en France, d’autre de rester à Nauvoo en abandonnant la communauté et d’autres encore suivent Gérard. En 1863, la communauté Icarienne de Corning n’est plus composée que de soixante personnes mais sa prospérité et sa bonne productivité attirent de nombreux nouveaux et anciens colons. En 1876, un nouveau conflit interne éclate : le parti des Jeunes Icariens, progressistes et révolutionnaires, accuse ce qu’il appelle la “ Vieille Icarie ” d’être trop conservatrice et routinière. En 1878, c’est la Circuit court du comté qui règle cette affaire en prononçant la dissolution de la communauté. En janvier 1883, le parti de la Jeune Icarie fonde en Californie la communauté Icaria Speranza qui est dissoute le 3 août 1886 par la Cour. La “ Vieillie Icarie ”, quant à elle, reste sur le même terrain en rebaptisant la communauté “ Icaria ”. Elle existe jusqu’au 16 février 1895 lorsqu’elle doit prononcer sa dissolution, faute de nouveaux colons pour assurer la production.

"Voyage en Icarie sera plusieurs fois critiqué pour son totalitarisme, certains tenteront cependant de mettre en place des communautés respectant au moins partiellement ces principes. Cabet part en 1849 pour le Texas rejoindre des Icariens avant de mourir à Saint-Louis l’année suivante, et la dernière communauté disparaîtra à la fin du XIXe siècle." (Exposition BNF, Cabinets de lecture, l'utopie).

Références : Jules Prudhommeaux, Etienne Cabet et les Origines du Communisme Icarien., Nîmes : Imprimerie coopérative La Laborieuse, 1907. 218 pages ; Jules Prudhommeaux, Histoire de la Communauté Icarienne., Nîmes : Imprimerie coopérative La Laborieuse, 1906. 481 pages. Référence électronique : http://le-bibliomane.blogspot.com/2009/11/le-reve-americain-detienne-cabet-ou.html [En ligne], consulté le 26/05/10. Kress C.6555 ; Negley 175 ; Sabin 9787 ; Streeter VII, 4245.

Cet ouvrage se trouve difficilement en belle condition d'époque. Il existe une édition identique du point de vue de la pagination à la date de 1845, à la même adresse. Cette édition de 1848 doit être un retirage de l'édition de 1845 avec une nouvelle date sur le titre. C'est ici l'édition la plus complète.

BON EXEMPLAIRE DANS SA PREMIÈRE RELIURE.

VENDU